Parce que mes pieds sont têtus.

lundi 15 septembre 2014

Le long du canal.

Bonheur du petit jour.
Dimanche matin, le réveil ne m'est d'aucun intérêt. 
La tête s'éveille toute seule. Premier regard vers la fenêtre.
Il fera beau ce matin sur le canal.
Je me glisse hors de la chambre. Les affaires m'attendent depuis la veille.
Léger déjeuner, nouvelles du matin. Lacets vérifiés. J'apporte avec moi une playliste de musiques variées qui rythmeront les foulées aussi bien que les vagabondages de l'esprit.
Que j'aime ces sorties longues !
Elles n'appartiennent qu'à moi.
Vous ne la voyez pas cette bulle aérienne. Elle m'enrobe corps et âme.
J'y range à loisir le chapelet des gens que j'aime, les pensées éphémères, des idées moins légères.
Je passe sans aucune honte du dernier dessin de ma fille à la maladie de cette amie. 
Du dessert d'hier soir au rendu de ma prochaine robe.
De la couleur de mon prochain vernis à l'exploit sportif d'un proche.
La sortie longue du dimanche est une ronde virevoltante.
J'ouvre grand les yeux, et le coeur aussi.
Le monde passe, comme en apesanteur. Coureurs du dimanche, runners confirmés, familles à bicyclettes, cyclistes chevronnés.
Les avirons glissent . Gerris légers ils marquent la cadence. Il n'est pas rare que l'on fasse route ensemble. Moi sur la rive. Eux sur l'eau. Silencieux chacun à notre effort et pourtant si consciemment liés en ce dimanche de paix.
Elles sont jolies ces petites jeunes. Sweat à la mode, un peu trop chaud pour la saison, queue de cheval chaloupée et portable au poing. Elles jacassent de l'air du temps en trottinant doucement pour faire fondre le dernier Mojito.
Celui ci va bien trop vite. Il n'aime pas être doublé. Je le rattraperai bientôt. 
Elle a du mérite la petite dame. Voûtée sur sa petite foulée. C'est beau de s'accrocher.
Les hommes arborent fièrement le t-shirt de leur dernier marathon. Les demoiselles en débardeur profitent de l'été Indien. Le fil des écouteurs glissé entre des seins que l'on ne saurait voir.
A l'approche du marathon, les profils se définissent.
Je pourrais parier sur les objectifs des uns et des autres.
Le coureur du dimanche passe. Le futur marathonien salue. Un hochement de tête, un signe de la main. Un sourire. On se reconnaît. Il y a des choses qui se partagent et qui ne se disent pas.
Vous êtes tous mes frères. Coureurs du canal.
Votre horizon se compose des couleurs du midi. Les grands platanes tamisent les ardents rayons d'un soleil que l'on espère un peu moins chaud bientôt.
Les chaussures encore un peu neuves martèlent une piste que l'on connaît par coeur.
En deux heures, un aller et un retour, je vais jusqu'à la jolie écluse de Castanet. Il faudra un jour que je m'y arrête. Le goût du diabolo menthe, sur la terrasse, doit y être divin.
Je pousse au prochain pont. 6 km de plus. 2 heures 30. Une jolie sortie.
En remontant vers le nord, le canal prend une teinte plus sombre. Je ne pense pas au retour. Les jambes sont autonomes. Au delà de 15 km, la tête est définitivement ailleurs .
Il suffirait d'un rien, d'ailleurs, pour qu'elles décident, 
contre toute raison, de faire volte face 
pour filer vers la mer.



5 commentaires:

  1. Tu écris très bien sur la course!

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  2. Magnifique récit...comme toujours !!

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  3. 2h30 ... ca me fait halluciner ! Bravo !
    Et j'aime beaucoup ta description ! On y est presque avec toi sans le souffle court !

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  4. Tu sais j'ai partagé ce texte ce FB, et les retours ont été unanimes: tu parles très bien de la sortie du dimanche. Bravo, bravo. Tu as les jambes ET la tête.
    Je pense bien à toi en cette préparation de marathon....

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